Jean-Claude Tremblay
Si les Nordiques ont survécu à leur première saison et fini par rejoindre la LNH, c'est bien grâce à leur première vedette, le défenseur Jean-Claude Tremblay.
Sans des vedettes comme Bobby Hull et Gerry Cheevers, l'AMH n'aurait jamais connu autant de succès à ses débuts. En contrepartie, l'AMH a payé ces joueurs à leur juste valeur, eux qui étaient carrément exploités par leurs employeurs de la LNH. À ce sujet, le cas de Jean-Claude Tremblay est révélateur. En 1972, les Canadiens de Montréal ne lui offrent que 70 000 $ par saison, malgré 13 ans de loyaux services; les Nordiques, eux, lui offrent 140 000 $ par saison pour cinq ans. Pour un gars aussi fier et courageux, la décision n'est pas très difficile à prendre: ce sera Québec. Malgré tout, à Montréal on ne se gêne pas pour le traiter de «sans-cœur» et de déserteur.
Les Nordiques ont visé juste avec Tremblay, véritable magicien de la rondelle et général à la ligne bleue. L'athlète originaire de Bagotville n'est peut-être pas le défenseur le plus rapide, mais quel contrôle du disque! Comparable au grand Bobby Orr! Novateur, Tremblay a développé un tir «papillon» à longue distance, dont les rebondissements imprévisibles surprennent les meilleurs gardiens de but. Mais il a aussi un sale caractère, ce qui lui vaut les surnoms de «ténébreux» et «bougonneux». Formé à la vieille école, Tremblay n'a rien des nouvelles super-vedettes des années 1970 avec leurs sourires grands comme ça. Comme c'est souvent le cas, derrière cet air bourru se cache un cœur d'or, qui en fait un vétéran respecté de tous ses coéquipiers.
Comme prévu, le numéro 3 porte les Nordiques sur ses épaules durant leur saison inaugurale. Le 18 janvier 1973, une blessure à François Lacombe le force à disputer 63 des 70 minutes d'un match qui s’est poursuivi en prolongation. C'en est trop. Le 12 février, Jean-Claude se retrouve à l'hôpital, victime de surmenage. Les électrocardiogrammes semblent indiquer que le défenseur de 34 ans est au bord de l'infarctus… et de la retraite. Un nouvel examen à l'Institut de cardiologie de Montréal démontre au contraire qu’il possède un «cœur d’athlète». Ramené d'urgence à Québec en ambulance le 16 février, il dispute le soir même le match contre les Sharks de Los Angeles. Increvable! Heureusement, les Nordiques finissent par chercher du renfort en vue de la saison 1973-1974, ce qui permet au magicien de souffler un peu.
La coupe Avco que Québec remporte en 1977 apporte beaucoup de fierté à Jean-Claude, cet artisan de la première heure. Mais les sept saisons du défenseur à Québec ne sont pas faites que de bons souvenirs. Lors d'un match éliminatoire contre Phoenix en 1975, il est hué et arrosé de bière par quelques amateurs du Colisée. «JC» jure alors qu'il s'en ira de Québec une fois son contrat de cinq ans terminé. À l'été de 1977, il subit l'ablation d'un rein et, après avoir reçu des offres de plusieurs équipes de l'AMH et de la LNH, il décide de rester à Québec. L'été suivant, les négociations piétinent avec la direction et Jean-Claude voit son salaire diminuer de 40 000 $. Il ne le pardonnera jamais aux Nordiques.
Les Nordiques font le saut dans la LNH en 1979, mais sans Tremblay qui doit tirer sa révérence. Parti en Suisse, il renoue avec les Canadiens de Montréal en tant que dépisteur pour l'Europe. Contrairement aux Nordiques, le Tricolore a toujours su réintégrer ses anciennes vedettes dans son organisation. La vie paisible de Jean-Claude prend un tournant tragique en 1994 lorsqu'il apprend qu'il est atteint du cancer. Son courageux combat prend fin le 7 décembre 1994, quelques jours après le match des Anciens Nordiques organisé en son honneur au Colisée. Malgré une carrière fabuleuse, Jean-Claude Tremblay n'a toujours pas sa place au Temple de la Renommée, parce qu'il a osé tenir tête à la LNH en 1972.
Voir aussi
Statistiques et cartes de Jean-Claude Tremblay
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