Les joueurs anglophones
La langue pose un défi à l'organisation des Nordiques: l'intégration de joueurs anglophones dans une communauté massivement francophone.

Aux débuts des Nordiques dans l'AMH, en 1972, l'intégration des joueurs anglophones dans une ville presque entièrement francophone comme Québec ne pose aucun problème: il n'y a à peu près pas d'anglophones dans l’équipe! Mais graduellement, les Hoganson, Gallant, Fitchner et Brackenbury se joignent aux Fleurdelisés. En 1975-1976, on raconte que des joueurs anglophones se plaindraient du manque d'attention de la part de leurs collègues francophones. Avec l'entrée des Nordiques dans la LNH, l'organisation comprend le message et entreprend des efforts considérables pour aider les joueurs anglophones et leurs familles à s'adapter à leur nouveau milieu.

En septembre 1980, toutefois, un joueur anglophone retranché de la formation, Reggie Thomas, accuse les Nordiques de racisme. Selon lui, on l'a retiré de son trio avec Hislop et Ftorek parce qu'ils étaient tous anglophones. Thomas ajoute que pas un seul joueur anglophone n'est heureux à Québec et qu'il va y avoir une «purge» bientôt… Propos ridicules! La triste vérité, c'est que Thomas n'a tout simplement pas le calibre pour jouer dans la LNH, ce que l'avenir prouvera. En fait, au début des années 1980, la grande majorité des joueurs anglophones à Québec, les Hunter, Ftorek, Moller, Price et Malarchuk, sont fiers de porter l'uniforme fleurdelisé et adorent la ville de Québec.

Des joueurs au talent douteux comme Reggie Thomas, Gerry Hart et Dave Farrish, on peut s'en passer. Le cas de John Ogrodnick est beaucoup plus sérieux. Après avoir demandé une transaction durant tout l'été 1987, «Johnny O» est cédé aux Rangers de New York. Puis c'est au tour de Walt Poddubny de vouloir quitter Québec. Et Greg Millen refuse de s'y rendre. Avec le «problème» de la langue, l'écart qui se creuse entre le dollar canadien et le dollar américain, et la dégringolade des Nordiques au classement, les vedettes ne veulent plus jouer pour Québec. Comme si ce n'était pas assez, des médias américains tombent dans le panneau et colportent toutes sortes de faussetés sur la ville de Québec; par exemple, un journaliste du USA Today écrit en 1990 qu'il n'y a même pas d'écoles anglophones ni de télé en anglais à Québec!

Il n’est pas surprenant qu'un paquet de joueurs fassent ajouter dans leur contrat une clause de non-échange aux Nordiques. On connaît la chanson: «Québec est une belle ville à visiter, mais pas pour y habiter!» Paradoxalement, durant ces mêmes années le nombre de joueurs anglophones au sein de l'équipe augmente sans arrêt. La formation régulière des Nordiques en 1991-1992 ne compte plus que six joueurs francophones: Claude Lapointe, Marc Fortier, Steven Finn, Stéphane Morin et les gardiens Jacques Cloutier et Stéphane Fiset. C'est moins que les huit fleurs de lys sur le chandail des Nordiques! Et les nouvelles vedettes du club, les Sakic, Sundin et Nolan, ne parlent pas le français.

Comment expliquer un tel revirement? Après 1980, les Nordiques n'ont pas repêché assez de joueurs francophones et les rares qui l'ont été ont souvent déçu (surtout Daniel Doré en 1988). Sans joueurs francophones de premier plan, difficile pour les amateurs québécois de s'identifier à leur équipe! Ils s'ennuient des belles années avec les Tremblay, Tardif, Cloutier, Goulet et même les frères Stastny qui se sont si bien intégrés à la ville de Québec. À bien y penser, le manque de vedettes francophones après 1990 a peut-être fait plus de mal aux Nordiques que les malheurs de certains joueurs anglophones en difficulté d'adaptation.

Voir aussi
Varia: Lieux de naissance des 317 joueurs des Nordiques


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