Saison 1988-1989
Dans une saison fertile en rebondissements, les Nordiques dégringolent au classement et viennent près d’être vendus à des intérêts ontariens.
À l'automne de 1988, les yeux de tous les amateurs de hockey sont rivés sur les États-Unis où deux légendes du hockey, Wayne Gretzky et Guy Lafleur, s'apprêtent à faire leurs débuts chez les Kings de Los Angeles et les Rangers de New York respectivement. Rien de comparable n’attire l’attention à Québec où la situation est loin d'être rose. Après 14 ans au poste de directeur-gérant, Maurice Filion est remplacé par Martin Madden qui choisit comme adjoint Jean Perron, disponible après son départ forcé de Montréal. Madden subit les foudres de la presse en sélectionnant Daniel Doré au lieu de Martin Gélinas au premier tour du repêchage amateur et il effectue une transaction qui envoie Normand Rochefort et Jason Lafrenière aux Rangers en retour de Walt Poddubny, Jari Gronstrand, Bruce Bell et un choix de quatrième tour. Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’on s’est départi du «Roc», mais on compte sur Poddubny pour réveiller l'attaque.
Le va-et-vient se poursuit: Alan Haworth, Terry Carkner et Mike Eagles sont partis, Bob Mason, Greg Smyth et Iiro Jarvi arrivent. Les Nordiques accueillent aussi quelques espoirs: Stéphane Guérard, Marc Fortier, Tommy Albelin et Mark Vermette. Ce n’est pas vraiment la récolte du siècle, à l'exception du talentueux Joe Sakic, maintenant prêt à faire le saut dans le grand club. Les observateurs prédisent plutôt un bel avenir aux Fleurdelisés renouvelés — imbattables dans deux ou trois ans, dit-on —, mais pour l'instant la troupe de Ron Lapointe semble destinée au dernier rang de sa division. Après quatre gains à leur six premières rencontres, les Nordiques ne remportent que deux des 14 parties suivantes. On prédit le passage de Jean Perron derrière le banc, mais ce dernier assure qu'il ne veut plus jamais être entraîneur; il devrait savoir qu'il ne faut jamais dire jamais.
En plein milieu de cette série noire, les partisans des Nordiques encaissent un dur coup en apprenant que leur équipe sera vendue à des intérêts ontariens. Fort heureusement, Marcel Aubut dispose d'un délai de 30 jours pour égaler l'offre, mais celle-ci est retirée en raison de la pression du public sur la brasserie O'Keefe. Le président des Nordiques réussit donc à garder les Nordiques à Québec et les projecteurs se braquent à nouveau sur la patinoire, où l’équipe n’est toujours pas sortie du bois. La crise atteint un sommet en décembre avec le congédiement de l'entraîneur-adjoint Guy Lapointe et les huées du public qui réclame à hauts cris Jean Perron comme entraîneur. Se sentant beaucoup plus fatigué que d'habitude, Ron Lapointe consulte ses médecins, qui font une terrible découverte: l'entraîneur des Nordiques est atteint d'une tumeur cancéreuse au rein.
Lapointe en est avisé le 15 décembre, le jour d'un match contre les Canadiens au Colisée. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre: Ron Lapointe en est à son dernier match comme entraîneur des Nordiques. Ses joueurs s'arrachent le cœur en troisième période et transforment leur retard d'un but en une victoire de 6 à 4. On assiste à un des moments les plus touchants de l'histoire du club quand Mario Gosselin remet la rondelle du match à un Ron Lapointe fort ému. «C'est une journée inoubliable. Ce matin, j'ai reçu une claque à l'hôpital. Ce soir, les joueurs m'ont donné une victoire1». Dans ces circonstances dramatiques, Jean Perron prend la relève de Lapointe, qui succombera finalement au cancer le 24 mars 1992, à l'âge de 42 ans.
Sous la gouverne de Perron, les Nordiques se hissent au quatrième rang de la division Adams à Noël, mais ils retombent rapidement à la cinquième place avec seulement 30 points à la mi-saison. Les Fleurdelisés ont bien un nouvel entraîneur mais c'est toujours la même équipe, un mélange sans caractère de vétérans au ralenti et de jeunes joueurs au talent incertain. Début janvier, un journaliste de Calgary compare le club québécois à une bande de dindes, image reprise par une station de radio de Québec qui en fait une chanson à succès. Bientôt, toute la Vieille Capitale ne parle que des «Nordindes», ce que, naturellement, les joueurs et la direction n'apprécient pas du tout. Irrité de diriger des «touristes» sur la patinoire, Perron perd patience avec Anton Stastny qu'il retire de la formation. Rien pour améliorer les relations déjà tendues entre l'entraîneur et le capitaine Peter Stastny dont le leadership est également contesté!
Le 23 janvier, au milieu de la troisième période du match opposant les Whalers aux Nordiques, on doit interrompre la rencontre une trentaine de minutes en raison d’une violente tempête de… papier de toilette qui s’est abattue sur la patinoire du Colisée. Des spectateurs, encouragés par le trompettiste Claude Scott déguisé en arbitre et appuyé contre la baie vitrée, manifestent ainsi leur mécontentement à l'endroit de l'arbitre Kerry Fraser, même si ce dernier n'est pas entièrement responsable du pointage de 5 à 0 en faveur des Whalers. Les joueurs sont renvoyés au vestiaire, le trompettiste est sévèrement blâmé par la ligue, les rouleaux de papier de toilette sont retirés du Colisée et les Nordiques sont de nouveau la risée générale.
Dans une fin de saison triste à mourir, Jeff Brown bat tous les records offensifs pour un défenseur des Nordiques avec 21 buts et 47 passes, mais les piliers de l'équipe, Michel Goulet et Peter Stastny, semblent avoir perdu leur feu sacré; une rumeur de transaction les envoie tous les deux à Edmonton. Les Nordiques sont éliminés le 19 mars et démolis par 8 à 0 au Forum de Montréal trois jours plus tard; dès la deuxième période, les partisans du Tricolore ont entonné le dérisoire «Hey Hey Goodbye». Avec 61 points, Québec termine pour la première fois au dernier rang du classement général de la LNH. Paul Gillis est nommé joueur de l'année chez les Nordiques, autre indice que les Fleurdelisés ont connu une bien mauvaise saison. En signe de moquerie, des amateurs organisent un défilé des «Nordindes» sur la Grande-Allée.
L'avenir s'annonce très sombre mais un événement inattendu ranime l'espoir des amateurs québécois. Le congédiement de Michel Bergeron à New York sème la folie dans la Vieille Capitale, qui réclame aussitôt le retour du «tigre» derrière le banc des Nordiques. Martin Madden se montre d'abord très réticent: «Je suis surpris de ce qui lui arrive mais il n'est pas question qu'on lui offre un emploi avec les Nordiques présentement. J'ai déjà mon entraîneur et il n'est pas question de le remplacer2». La pression populaire et le départ hâtif de Perron ne laissent toutefois aucun choix à Madden, qui embauche Bergeron le 14 avril 1989. En acceptant de seconder Martin Madden dix mois plus tôt, Jean Perron ne s'attendait certainement pas à vivre une saison aussi éprouvante.
Notes de référence
1. La Presse, 16 décembre 1988, p. S3.
2. La Presse, 2 avril 1989, p. S5.
Voir aussi
Profil: La direction
Souvenir: La vente des Nordiques (1988)
Statistiques, saison 1988-1989
Autocollants Esso, saison 1988-1989
Autocollants Frito-Lay, saison 1988-1989
Cartes postales des Nordiques, saison 1988-1989
Cartes O-Pee-Chee/Topps, saison 1988-1989
Autocollants O-Pee-Chee, saison 1988-1989
Cartes O-Pee-Chee Minis, saison 1988-1989
Autocollants Panini, saison 1988-1989
Magazines, saison 1988-1989
Photo d'équipe, saison 1988-1989
Page précédente: Saison 1987-1988
Page suivante: Saison 1989-1990