Saison 1984-1985
Après un début de saison bien ordinaire, les Fleurdelisés se ressaisissent et passent à un cheveu de participer à la finale de la coupe Stanley.
Un nouveau tournoi de la coupe Canada se déroule en septembre 1984. C’est Glen Sather, l’entraîneur des Oilers, qui a formé et entraîne l’équipe canadienne, où se retrouvent naturellement une bonne proportion de ses joueurs. Des Nordiques, seuls Michel Goulet et Peter Stastny, qui vient tout juste d'obtenir la citoyenneté canadienne, ont été sélectionnés. Si Goulet excellera avec 10 points, Peter déçoit et doit se contenter de jouer au sein du quatrième trio. De plus, le numéro 26 est suspendu pour les trois premiers matches de la saison régulière pour avoir bousculé un juge de ligne lors d'un match pré-saison le 25 septembre. Il y a de quoi inquiéter les amateurs québécois, qui n'ont jamais vu le Slovaque dans un tel pétrin!
Par ailleurs, on se dispute le premier rôle devant le filet des Nordiques. Transfuge des Canadiens, Richard Sévigny s’est joint à l'équipe, mais il est accueilli avec perplexité par les partisans qui n'ont pas oublié sa participation déterminante à la bagarre du Vendredi saint quelques mois plus tôt. Son arrivée porte à quatre le nombre de gardiens et les Nordiques décident de renvoyer Clint Malarchuk à Fredericton. C’est cependant un gardien de but ennemi, un certain Patrick Roy, qui se signale le 8 octobre en aidant les Canadiens à battre les Nordiques lors d'un match hors concours présenté au Colisée. Par ailleurs, les Fleurdelisés perdent deux joueurs au repêchage intra-ligue, soit André Doré (Rangers) et Wally Weir (Hartford), ce dernier très déçu de quitter Québec après huit saisons avec les Nordiques.
Le 20 octobre, les Fleurdelisés se paient la traite à Toronto avec une victoire de 12 à 3; c’est une soirée-record avec 53 tirs au but et trois filets en désavantage numérique. Le début de saison des Nordiques n’en est pas moins laborieux: l’équipe présente un dossier de seulement 31 points après 33 rencontres. Très faible en avantage numérique et incapable d'aligner les victoires, le club québécois semble à nouveau sans vie. Des rumeurs délirantes circulent dans l'entourage du club: on parle notamment d’une mégatransaction qui enverrait les frères Stastny à Vancouver. Le directeur-gérant Maurice Filion réplique: «Je ne suis pas un fou1». Un quotidien montréalais prétend que Michel Bergeron est sur le point d'être congédié. La foule du Colisée s'impatiente devant les insuccès des Nordiques à domicile et le gardien Daniel Bouchard se met dans l'eau chaude en invitant les amateurs frustrés à rester chez eux.
Malgré le triste épisode du Vendredi saint — ou serait-ce à cause de cet événement malheureux? —, la rivalité Canadiens-Nordiques demeure vive. Les deux équipes s'affrontent cette année encore à deux reprises à la fin du mois de décembre. Cette «série de la tourtière» provoque bien des discussions au sein des familles réunies pour le temps des Fêtes. La veille du jour de l'An au Forum, la bataille se termine par un verdict nul de 4 à 4 après deux buts de dernière minute des Canadiens aux dépens de Richard Sévigny. Le 7 février 1985, le match Canadiens-Nordiques présenté au Colisée est perturbé par des étudiants de l'Université Laval déterminés à faire triompher leur défi de carnaval: après avoir «forcé» Guy Lafleur (qui a pris sa première retraite quelques mois plus tôt) à porter le chandail des Nordiques, des plaisantins sèment la confusion en envoyant sur la patinoire trois petits cochons déguisés en arbitres. L’image fait le tour de l'Amérique…
Après leur début de saison en dents de scie, les Nordiques retrouvent leur force de frappe. Le point tournant de la saison est sans contredit l'arrivée de Brent Ashton et du défenseur Brad Maxwell, acquis des North Stars du Minnesota le 14 décembre en retour de Tony McKegney et Bo Berglund. De son côté, Michel Goulet se dirige tout droit vers une saison de 55 buts, bien qu'il ait raté une douzaine de parties après s'être fracturé le pouce droit sur le casque de Kevin Dineen lors d'une bagarre le 2 janvier. À la ligne bleue, les Nordiques semblent enfin entre de bonnes mains avec les Marois, Maxwell, Moller, Price, Rochefort, Bell et Wesley, tandis que devant le filet Richard Sévigny et Mario Gosselin se partagent la tâche (Sévigny sur la route, Gosselin au Colisée). Seuls Wilfrid Paiement et Marian Stastny vivent des moments difficiles, le premier boudé par les amateurs et l'autre cloué au banc.
Forts d’un esprit d'équipe réanimé, les Nordiques luttent pour le premier rang de la division Adams avec les Canadiens de Montréal et les Sabres de Buffalo. Le 4 avril, les Fleurdelisés disputent un match crucial au Forum, mais ils se font ridiculiser par 7 à 1. Encore une fois, une partie de l’action se déroule en dehors de la patinoire alors que le lutteur Dino Bravo, assis derrière le banc des Nordiques, enguirlande Michel Bergeron et ses joueurs. Marcel Aubut exige l'installation d'une baie vitrée derrière le banc des visiteurs au Forum, mais les employés du «temple» répliquent en accusant les Nordiques de changer le banc de place à chacune de leurs visites. Au moins, les Canadiens donnent un fier coup de main aux Fleurdelisés en remportant leur dernier match contre Buffalo, qui termine un point derrière Québec. L'avantage de la glace s'annonce déterminant puisque les Sabres ont perdu leurs quatre matches au Colisée durant la saison régulière.
Contrairement à l'année précédente, les deux rivaux de la division Adams vont se livrer une lutte endiablée. Cette excellente série trois de cinq débute le 10 avril au Colisée par un gain de 5 à 2 des Nordiques; le match a duré un peu plus longtemps que prévu, interrompu par une panne d'éclairage de 20 minutes. Le lendemain, les Fleurdelisés arrachent la victoire aux Sabres grâce au brio de Mario Gosselin et à un but de Normand Rochefort à cinq minutes de la fin. La série se transporte à Buffalo, où les Sabres inscrivent des gains de 6 à 4 et 7 à 4; le quatrième match est ponctué de plusieurs incidents dont un but évident de Michel Goulet que l'arbitre et le juge de but ont loupé. Dans le dernier match de la série, Buffalo mène par 5 à 3 au milieu de la troisième période, mais les Nordiques effectuent une splendide remontée, couronnée par le but victorieux de Brent Ashton à 69 secondes de la fin du temps réglementaire. Les Nordiques n'ont guère le temps de fêter cette issue réjouissante, puisque les Canadiens les attendent de pied ferme en quart de finale.
Le troisième acte de la bataille du Québec débute le 18 avril au Forum par une victoire de 2 à 1 des Nordiques sur un but en prolongation de Mark Kumpel. Trois jours plus tard, le Tricolore l'emporte par 6 à 4 pour égaliser à 1-1 dans la série. Le 23 avril, Québec revient quatre fois de l'arrière et gagne le match par 7 à 6 en vertu d’un autre but en prolongation, celui de Hunter cette fois. Montréal remporte le match suivant par 3 à 1, mais les Nordiques reprennent les devants avec un gain de 5 à 1 au Forum malgré l'absence de Michel Goulet. Entre-temps, la guerre des nerfs se poursuit toujours à l’écart du front: les deux équipes s'accusent mutuellement de manquer de fair-play, tandis que le Journal de Québec annonce prématurément la visite des Flyers de Philadelphie à Québec. Les Fleurdelisés ratent une chance en or de mettre un terme à la série au Colisée et s'inclinent par 5 à 2 dans le sixième match. On se donne rendez-vous au Forum pour le match décisif, le dix-septième affrontement de l'année entre les deux clubs.
Après avoir pris les devants par 2 à 0 au début de la deuxième période sur un but de Jean-François Sauvé, les Nordiques voient Mario Gosselin s'écrouler à la suite d’un tir frappé de Mario Tremblay près du cou. Ils en sont quittes pour une belle frousse, car le «Goose» se relève et continue le match. Montréal créé l'égalité à fin de la deuxième sur un but de Mats Naslund. En troisième, les deux clubs jouent de prudence et la tension est insoutenable. Mark Hunter vient bien près de donner les devants aux Canadiens avec un tir sur la barre transversale. On se retrouve en prolongation, dont Peter Stastny fera son affaire. Après une mise en jeu dans le territoire des Canadiens, son deuxième tir en direction de Steve Penney franchit lentement la ligne rouge derrière le gardien du Tricolore. C’est une autre victoire historique pour les Fleurdelisés, grâce à leur leader incontesté. Et comme en 1984, Bergeron et Lemaire ne se serrent pas la main après le match.
Des milliers de partisans en liesse accueillent les Nordiques à l'aéroport de l'Ancienne-Lorette. Le maire de Montréal, Jean Drapeau, a perdu son pari avec son homologue de la Vieille Capitale, Jean Pelletier, et le drapeau de Québec flotte sur l'hôtel de ville de la métropole. Les Fleurdelisés affronteront en demi-finale les Flyers et cette fois, le club québécois a toutes les chances de l'emporter, d'autant plus qu'il a le privilège de commencer la série au Colisée. Dans le premier match, les deux équipes se livrent un excellent duel et, pour un deuxième match de suite, Peter Stastny marque le but victorieux en prolongation. La joie est cependant de courte durée à Québec puisque Philadelphie remporte le second match par 4 à 2, avant de gagner au Spectrum par le même score au troisième match. Québec n'a pas dit son dernier mot: deux buts d'Alain Côté et une autre brillante performance de Mario Gosselin aident les Nordiques à remporter le quatrième match par la marque de 5 à 3 sur la patinoire hostile des Flyers.
Dans le cinquième match, Philadelphie prend les devants par 2 à 1 sur un but de Murray Craven à la quinzième minute de la troisième période. À deux minutes de la fin, Michel Goulet égalise à l’aide de son patin, mais l'arbitre Kerry Fraser refuse le but, jugeant qu’il a commis un geste intentionnel. Le numéro 16 a beau prétendre qu'il ne voulait qu'arrêter la rondelle alors qu'il était étroitement surveillé par un joueur des Flyers, rien à faire! Philadelphie s'envole avec la victoire et Michel Bergeron prépare un montage vidéo à l'intention des médias. Cette initiative vaut une amende de 5000 $ aux Nordiques, mais elle impressionne les journalistes américains qui couvrent la série et qui sont de plus en plus convaincus eux aussi que l'arbitrage joue contre les Nordiques. Trop peu, trop tard puisque les Flyers remportent le sixième match par 3 à 0; le blanchissage est celui du gardien Pelle Lindbergh qui perdra la vie tragiquement en novembre 1985.
C'est encore la fin d'un beau rêve pour les partisans des Nordiques, eux qui ne verront plus jamais la coupe Stanley d'aussi près. Comme en 1982, les amateurs québécois ont de quoi être fiers de leur équipe, mais la défaite aux mains des Flyers leur brise le coeur. La coupe, ils y croyaient tellement! Le monde du hockey a raté de peu un spectacle grandiose: une finale entre les Nordiques et les Oilers d'Edmonton, les Stastny et Goulet contre Gretzky, Kurri et Anderson. Mais aussi deux anciens clubs de l'AMH, ce qui aurait sûrement déplu à certains dirigeants du circuit Ziegler!
Notes de référence
1. Le Soleil, 24 novembre 1984, p. S2.
Voir aussi
Profil: Peter Stastny
Statistiques, saison 1984-1985
Sommaire: Les Nordiques éliminent les Sabres
Sommaire: Suspense au Forum (bis)
Disques 7-Eleven, saison 1984-1985
Disques Kellogg's, saison 1984-1985
Cartes postales des Nordiques, saison 1984-1985
Cartes O-Pee-Chee/Topps, saison 1984-1985
Autocollants O-Pee-Chee, saison 1984-1985
Cartes postales Yum Yum, saison 1984-1985
Magazines, saison 1984-1985
Photo d'équipe, saison 1984-1985
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